Du rififi sur la Canebière

Publié le 25/09/2020

Marseille, Aix : une série haletante aux personnages complexes 

Marseille, le vendredi 25 septembre 2020

https://www.jim.fr/medecin/actualites/pro_societe/e-docs/marseille_aix_une_serie_haletante_aux_personnages_complexes__184554/document_actu_pro.phtml

– La vie politique est parfois un tourbillon. Mercredi, à la surprise générale, le ministre de la santé, Olivier Véran, a annoncé de nouvelles mesures sanitaires visant à combattre l’épidémie de Covid-19. Dès samedi, les bars et restaurants du département des Bouches du Rhone devront fermer. Des mesures à l’origine d’un feuilleton juridique palpitant, mais aussi de retournements de situation inédits.

Désobéissance pacifique chez LR ?

Premier constat, les adversaires du principe de précaution ne sont pas toujours là où on les attend. Quelques minutes après l’annonce, la nouvelle Maire EELV de Marseille, Michèle Rubirola a fulminé contre une mesure sanitaire en raison des conséquences lourdes pour tout un secteur de l’économie.

Deuxième constat, les admirateurs de la désobéissance civile ne sont pas toujours là où on les attend non plus. Sur Twitter, c’est le maire LR de Villeneuve-Loubet, Lionel Luca, qui invite restaurateurs à la « désobéissance civile et pacifique » en invitant notamment les citoyens à « aller soutenir les cafetiers et restaurateurs en occupant les lieux pour être servis et empêcher la fermeture des établissements ».

Dans une motion  présentée par le maire, et votée à l’unanimité par le Conseil municipal, il assure que sa ville « s’opposera par tous les moyens mis à sa disposition à toutes mesures arbitraires qui remettraient en cause la liberté d’entreprendre » des cafetiers et restaurateurs.

L’alliance de la carpe et du lapin

Un appel à la désobéissance civile qui a un écho à l’opposé du spectre politique chez Samia Ghali, deuxième adjointe de la ville de Marseille.

Cette dernière a notamment affirmé sur l’antenne de BFMTV que « la police municipale ne verbalisera pas les commerçants qui ne ferment pas ». Une décision juridiquement contestable, le maire ne pouvant en aucune manière redéfinir les missions de la police municipale ou « filtrer » les infractions à relever. Une souplesse surprenante chez une élue qui en 2012, en appelait à l’armée pour lutter contre l’insécurité dans certains quartiers de la ville.

Mesure et recours

Il reste que cette décision, pour le moins incomprise, est tombée comme un coup de massue dans la capitale phocéenne. Vendredi matin, les élus et les professionnels de la restauration et des salles de sport se sont regroupés devant le tribunal de commerce de Marseille pour manifester leur colère.

Dans le même temps, le président de la région PACA, Renaud Muselier, a annoncé son intention de saisir les juridictions administratives. Un recours qui ne peut être déposé « à titre préventif » dans la mesure où le Préfet, représentant l’État, n’a pas encore signé son arrêté alors même que la mesure est censée entrer en vigueur samedi !

Vendredi après-midi, le ministre de la santé s’apprête à affronter l’un des déplacements les plus difficiles de sa carrière de jeune ministre. Olivier Véran doit se rendre à l’hôpital de la Timone où il visitera notamment le service de réanimation.

Le Professeur Raoult s’en mêle !

Au centre des incompréhensions, l’interprétation des nombreux indicateurs autour de l’épidémie. Le premier adjoint au maire de Marseille ne cesse de le répéter : le taux d’incidence du virus dans les Bouches du Rhône baisse, preuve que les efforts fournis par la ville (et la préfecture…) commencent à porter leurs fruits. En conséquence, Marseille demande à Paris de revoir sa copie en sollicitant un délai de dix jours avant de prendre de nouvelles mesures.

Mais voilà, pour le Premier Ministre, interrogé lors de l’émission Vous avez la parole sur France 2, pas question pour le gouvernement de revoir sa copie au moment où les services de réanimation de Marseille approchent de la saturation. « Nous avons décidé de prendre des mesures plus dures. C’est une course contre la montre pour éviter d’arriver à des situations qui ont été connues au printemps dernier » a indiqué notamment Jean Castex.

Le gouvernement peut trouver un soutien (presque) inattendu dans les messages inquiétants  d’un certain nombre de médecins de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille qui ne cessent de s’alarmer sur la situation. Interrogé dans Le Monde, sous couvert d’anonymat, un médecin de l’AP-HM s’insurge contre la posture des élus marseillais : « demander le report des mesures à dix jours, cela relève de l’inconscience. A ce moment-là, il sera peut-être trop tard ».

Là encore, un infirmier anonyme de l’hôpital de la Timone ne cache pas son amertume : « Ils jouent un remake d’OM-PSG et ne proposent aucune solution. C’est une guerre des chiffres ».
Mais cette prise de position de certains médecins ne plait pas au Professeur Raoult. Le désormais célèbre microbiologiste n’y va pas par quatre chemins à l’égard de ses collèges : « Vous portez une responsabilité dans les mesures déraisonnables prises contre la ville, par le ministre de la Santé ».

C’est sans doute le dernier constat étonnant de ce feuilleton marseillais : l’on peut être le Professeur Raoult et ne pas apprécier les voix dissonantes. 

C.H.

A Marseille, l’obsession de « sauvegarder les activités hospitalières hors Covid »

L’afflux de patients contaminés par le nouveau coronavirus menace de saturer les capacités des hôpitaux dans les prochaines semaines

Par Gilles Rof  Publié le 23 septembre 2020 à 11h06

A l’hôpital de La Timone, à Marseille, le 11 septembre 2020.
A l’hôpital de La Timone, à Marseille, le 11 septembre 2020. CHRISTOPHE SIMON / AFP

https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/09/23/a-marseille-l-obsession-de-sauvegarder-les-activites-hospitalieres-hors-covid_6053286_3244.html

Malgré des mesures sanitaires renforcées à deux reprises, les 25 août et 14 septembre, les Bouches-du-Rhône restent le département où l’épidémie de Covid-19 évolue le plus défavorablement. En une semaine, le nombre de personnes hospitalisées a bondi de 405 à 515 patients. Mardi 22 septembre, 122 personnes étaient en réanimation. Quinze de plus que le mardi 15 septembre. Des cas concentrés, pour plus des trois quarts, dans Marseille.

« Aujourd’hui, nous ne sommes pas pris à la gorge, mais les tendances statistiques sont particulièrement inquiétantes. Et nous laissent entrevoir une courbe d’admissions en réanimation qui pourrait saturer nos capacités dans les prochaines semaines », prévient Anthony Valdez, directeur de l’organisation des soins à l’agence régionale de santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d’Azur. Mardi, 40 lits de réanimation sur 256 restaient disponibles à Marseille, tous types de pathologies confondus.Article réservé à nos abonnés Lire aussi  « On était vigilants, on est devenu inquiets » : face à la deuxième vague de l’épidémie, les hôpitaux sur la corde raide

L’ARS n’exclut pas des « déprogrammations d’interventions partielles et ciblées » dans les prochaines semaines, si la hausse des hospitalisations liées au Covid-19 se poursuit. Déjà, des blocs opératoires ont été mis en sommeil dans certains établissements privés marseillais pour redéployer médecins anesthésistes et infirmiers spécialisés en réanimation. « Les interventions prévues n’ont pas été annulées, mais décalées dans d’autres salles. Cela implique une certaine gymnastique dans l’organisation », reconnaît-on à l’ARS.

Manque de personnels

A l’AP-HM Hôpitaux universitaires de Marseille, la question de la déprogrammation tourne désormais à « l’obsession »« Notre double objectif est toujours de sauvegarder les activités hospitalières hors Covid le plus longtemps possible, tout en absorbant l’arrivée des patients Covid », martèle le professeur Dominique Rossi, président de la commission médicale de l’AP-HM. Sur ses cinq sites, ces dernières semaines, l’assistance publique marseillaise a ouvert 25 lits d’hospitalisation pour les patients positifs au coronavirus. Vingt-cinq autres doivent suivre dans les trois prochaines semaines.

« Pour les lits de réanimation, c’est plus difficile. Nous avons les locaux et le matériel, mais nous buttons sur les questions de personnel », détaille le directeur général, Jean-Olivier Arnaud. 
Confrontée à un absentéisme qui tourne autour de 13 %, en hausse de 2 % à 3 % depuis le rebond de l’épidémie, selon la direction, l’AP-HM a chiffré ses besoins : « 25 anesthésistes, 10 médecins urgentistes et 250 personnels non médicaux »,énumère son directeur général. Un appel à candidatures a recueilli près de 300 réponses, infirmiers et médecins confondus, qui sont actuellement à l’étude. « Mais nous savons que cela ne suffira pas », explique Dominique Rossi.

Lire aussi  Le point sur l’épidémie de Covid-19 en France : renforcement des mesures sanitaires dans les Bouches-du-Rhône et en Gironde

« Si l’on doit aller plus loin dans la réorganisation, nous serons obligés de fermer un, deux ou trois blocs par site pour libérer des personnels, estime le directeur général de l’AP-HM. Notre plan de déprogrammation sera ajusté au strict minimum. Les transplantations, la chirurgie lourde, ainsi que tous les actes qui entraîneraient une perte de chances pour les patients seront sacralisés. »

Face à une situation qui se tend quotidiennement dans les hôpitaux, les responsables sanitaires s’accrochent à une lueur d’espoir. Depuis quelques jours, l’ARS constate un tassement dans la progression de la positivité et de l’incidence du Covid-19 dans les Bouches-du-Rhône.

Covid-19 : « la colère gronde » chez les cafetiers et restaurateurs

Le secteur de la restauration, qui a déjà perdu 86 000 emplois au premier semestre, entend contester « devant les tribunaux » la fermeture totale ou partielle des cafés et restaurants. 

Par Clément Guillou  Publié hier à 14h58, mis à jour à 09h51

Devant un restaurant, à Paris, le 23 juillet.
Devant un restaurant, à Paris, le 23 juillet. CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/09/24/covid-19-remontes-contre-les-mesures-du-gouvernement-les-cafetiers-reclament-un-sursis-ou-de-nouvelles-aides_6053465_3234.html

Mercredi 23 septembre, en début de soirée, les tenanciers de cafés et de restaurants ont pris deux coups derrière la tête, l’un après l’autre. D’abord, durant la conférence du ministre de la santé, Olivier Véran ; ensuite, devant la météo. L’été indien est terminé, les ondées vont lessiver les terrasses étendues qui portaient l’activité depuis le déconfinement.

Dans l’agglomération d’Aix-Marseille et en Guadeloupe, déclarées zones d’alerte maximale par le gouvernement, bars et restaurants fermeront samedi 26 septembre. 

Dans onze métropoles en alerte renforcée – toutes les plus grandes de France hormis Nantes et Toulon –, les bars devront fermer dès 22 heures à partir de lundi 28 septembre. Voire plus tôt, si le préfet le décide. Pour eux aussi, le couperet d’une deuxième fermeture n’a jamais été si près de tomber. Il dépendra de l’évolution de la situation sanitaire dans leur ville.

Certains gérants, dont la quasi-totalité du chiffre se fait en soirée, devraient anticiper la décision, fermer leurs portes et se remettre sous le parapluie des mesures d’aide gouvernementales.

Des aides nouvelles pour les restaurateurs fermés

L’intérieur des bars et la consommation d’alcool en soirée sont considérés comme des vecteurs de propagation du virus et des mesures similaires ont été récemment adoptées au Royaume-Uni et dans plusieurs localités espagnoles, dont Madrid. Ces dernières semaines, des préfectures avaient déjà imposé des fermetures plus précoces aux bars dans les villes étudiantes. Suscitant déjà les mêmes réactions d’inquiétude – pour leur survie –, de colère – contre les collègues n’ayant pas fait appliquer les gestes barrières – et de dérision – « le virus commence à circuler à 23 heures ? ». Nombre d’élus locaux, dont les maires de Paris et Marseille, Anne Hidalgo (PS) et Michèle Rubirola (Europe Ecologie-Les Verts), reprennent aujourd’hui les discours des cafetiers, réclament un sursis et jugent la mesure inadaptée au contrôle de l’épidémie.Article réservé à nos abonnés Lire aussi  L’hôtellerie essaie de s’adapter à l’essor du télétravail

Jeudi 24 septembre, lors d’une conférence téléphonique avec le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, les représentants du secteur ont plaidé en vain pour une suspension de la mesure. Loin de faire marche arrière, le premier ministre, Jean Castex, sur France 2, a justifié cette mesure de fermeté et s’est engagé à « indemniser la perte du chiffre d’affaires que vous allez subir pendant cette période ». Les restaurateurs fermés administrativement bénéficieront d’une exonération des cotisations sociales et d’un fonds de solidarité à hauteur de 10 000 euros par mois, contre 1 500 euros actuellement. Le remboursement total du chômage partiel sera également prolongé au-delà du 1er novembre si nécessaire.

Cela suffira-t-il à apaiser la colère des professionnels marseillais et de leurs collègues des métropoles ? Pour ces derniers, le détail des aides devait être annoncé vendredi 25 septembre. « La colère gronde, s’inquiète M. Chenet, président du Groupement national des indépendants hôtellerie & restauration (GNI-HCR). On a affaire à des gens qui n’ont plus aucun espoir. Cette mesure va nourrir tous les mouvements populaires et populistes. »

La fébrilité est grande dans un secteur qui, au premier semestre, a déjà perdu 86 000 emplois, soit 10 % de la force de travail avant le Covid-19

La fébrilité est grande dans un secteur qui, au premier semestre, a déjà perdu 86 000 emplois, soit 10 % de la force de travail avant le Covid-19. Sans compter les nombreux saisonniers n’ayant pas été appelés cet été – les deux tiers environ, estiment les organisations patronales. A l’issue du deuxième trimestre, selon l’Insee, le secteur de la restauration employait 789 000 personnes, chiffre le plus bas depuis début 2017. Cette baisse intervient après dix ans de croissance ininterrompue de l’emploi salarié dans le secteur.

« Le comportement de quelques-uns »

Nombre d’entreprises ont eu recours au prêt garanti par l’Etat (PGE) pour pouvoir payer leurs bailleurs – qui n’ont pas pu ou voulu repousser les loyers. Une nouvelle restriction de l’activité mettra en péril le remboursement de ces PGE, estiment les organisations.

Les cafetiers et restaurateurs se savaient en sursis depuis la fin de l’été et la recrudescence de l’épidémie dans les grandes villes. L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH), principale organisation patronale, avait rappelé, le 18 septembre, les professionnels à un « strict respect » du protocole sanitaire, jugeant inacceptable que « le comportement de quelques-uns entraîne la fermeture des bars et restaurants ».

Dans bien des endroits très fréquentés cet été, la distanciation des tables, le port du masque par le personnel et la consommation debout n’étaient pas respectés. « Ce qui a foutu le bordel, ce sont les bars improvisés en boîtes de nuit, les plages et les bords de rivière comme à Lyon où les gens étaient partout, s’agaçait, début septembre, Laurent Duc, représentant de l’UMIH dans le Rhône. Si on avait mieux respecté les gestes barrières et si les préfectures avaient mis les moyens pour limiter les soirées privées, on n’en serait pas là. »Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Pour le tourisme français, une rentrée qui s’annonce perdue après un été au soleil

Dans les grandes métropoles, hors Marseille, le week-end du 25 au 27 septembrepourrait ressembler à la soirée du samedi 15 mars, lorsque la jeunesse avait profité jusqu’au bout de l’ouverture des bars pour un « dernier verre avant la fin du monde ».

Publié par jscheffer81

Cardiologue ancien chef de service au CH d'Albi et ancien administrateur Ancien membre de Conseil de Faculté Toulouse-Purpan et du bureau de la fédération des internes de région sanitaire Cofondateur de syndicats de praticiens hospitaliers et d'associations sur l'hôpital public et l'accès au soins - Comité de Défense de l'Hopital et de la Santé d'Albi Auteur du pacte écologique pour l'Albigeois en 2007 Candidat aux municipales sur les listes des verts et d'EELV avant 2020 Membre du Collectif Citoyen Albi

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