Publié le 24/09/2020
Le contre modèle suédois commence-t-il à porter ses fruits ?

Stockholm, le jeudi 24 septembre 2020 – Critiquée par certains observateurs, la Suède a tenu bon et a maintenu depuis le début de la crise une méthode unique en Europe face à l’épidémie de Covid : pas de confinement, pas de fermeture de bars, de restaurants et d’écoles*, pas de masque obligatoire (voire même une certaine circonspection vis-à-vis de cet élément de protection). En revanche, une batterie de mesures initiées au début de la crise continue à être en application : les rassemblements sont limités à 50 personnes, les lieux publics sont soumis à des contraintes drastiques de jauge, afin de pouvoir respecter d’importantes distances physiques. Le télétravail, enfin, reste recommandé et est massivement pratiqué par des Suédois, auxquels la fréquentation des transports en commun est déconseillée.
Les visites dans les Ehpad ont également été interdites, mais cette dernière mesure a été levée le 15 septembre.
Des chiffres qui font tâche dans le nord de l’Europe !
Cette politique à contre-courant aura, dans un premier temps, conduit à des résultats contrastés. Certes la Suède a connu une mortalité équivalente voire inférieure à des pays ayant imposé un confinement strict (581 morts/million d’habitants vs 664 en Espagne, 592 en Italie ou 482 en France) mais elle souffre de la comparaison avec ses voisins. Ainsi la Norvège (49 décès/million), la Finlande (62/million) et le Danemark (111/million) font figure de bons élèves par rapport au pays de Bernadotte.
Idem, concernant l’économie, certes le Royaume s’en sort un peu mieux que la moyenne européenne, mais enregistrera tout de même, pour 2020, une récession comparable à celle de ses voisins scandinaves.
Un « miracle » Suédois ?
Mais, depuis la mi-juillet, certains veulent croire au miracle suédois. Les indicateurs de l’épidémie ont en effet beaucoup baissé pour se stabiliser. On ne recense plus désormais qu’entre un et cinq décès par jour alors même que l’on constate une hausse, qui reste modérée, de la mortalité dans certains pays d’Europe. Aussi, ces deux dernières semaines, la Suède connaît un taux d’incidence hebdomadaire stable d’environ 25 pour 100 000 contre, par exemple, environ 100 pour 100 000 en France actuellement.
Pour expliquer ce « mystère » certains, comme l’épidémiologiste danois Kim Sneppen, avancent l’hypothèse de l’immunité collective.
« Cette immunité, ajoutée aux gestes barrières, suffit pour garder la maladie sous contrôle. L’épidémie pourrait avoir été endiguée » estime-t-il. Une idée contestée, même en Suède, puisqu’il semble que la séroprévalence de SARS-CoV-2 ne dépasse pas les 10 % dans le pays. Plus certainement, d’autres louent le sens des responsabilités des Suédois et un sens inégalé du pragmatisme. Ce dernier continue à s’imposer dans le discours du responsable de la gestion de l’épidémie, Anders Tegnell.
Une politique du temps long
« Aujourd’hui dans toute la Suède nous n’avons que quinze patients Covid en réanimation. C’est très peu, on doit mettre en place des mesures à long terme. On ne peut pas espérer régler tout ça en confinant toute la société. On sait que ce virus sera présent longtemps donc on a cherché des mesures qui seraient acceptées par tous. Et je crois qu’on a trouvé une bonne voie. Si on continue comme ça la situation devrait être stable dans le pays » explique-t-il.
Concernant le masque, le spécialiste remarque toujours : « Garder ses distances est bien plus important ».
S’il n’exclut pas de pouvoir l’imposer « pour une courte période, dans un endroit spécifique, si les cas augmentent et que les mesures habituelles ne fonctionnent pas », les exemples de généralisation ne le convainquent pas : « On voit bien que dans les pays qui l’ont rendu obligatoire, les contaminations ne baissent pas de façon drastique ».
C.Q.F.D ?
* Les lycées et les universités ont, néanmoins, un temps été fermés
Commentaire Dr Jean SCHEFFER:
Si actuellement le taux d’hospitalisation, de patients en réanimation, et le nombre de décès est très faible, les décès au total par million d’habitant restent élevés supérieurs à la France (Suède 13ème – France 16ème). L’ avantage concernant l’ économie n’est pas évident: une récession de 8,6% identique à la moyenne européenne et supérieure à l’Allemagne -6% et au Pays-Bas 6,8%.
Cependant l’histoire en France n’est pas finie et nos décès risquent de rattraper ceux de la Suède.
Suivre les chiffres de la pandémie mise à jour le 23 septembre 2020
MONDE
LES MORTS DANS LE MONDEpour 1 million d’habitants
1.Pérou986,8
2.Belgique871,9
3.Andorre688,3
4.Bolivie681
5.Espagne664,2
6.Brésil659,3
7.Chili659,1
8.Equateur653,9
9.Royaume-Uni630,9
10.Etats-Unis617,1
11.Mexique593,9
12.Italie591,7
13.Suède577
14.Panama548,5
15.Colombie498,4
16.France469,4